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le 26/09/2016 à 17:03:42
Le gouvernement français a décidé, en date du 30 décembre 2015, de s'asseoir purement et simplement sur les règles de sécurité de 2005 concernant les cuves des réacteurs nucléaires. "L'arrêté publié en catimini le 3 janvier 2016, prévoit que si on ne respecte pas une exigence essentielle, alors on peut, sous réserve de produire un dossier, démontrer que ce n'est pas grave", précise Sylvie Cadet-Mercier, directrice à l'IRSN (Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire).
Triple irresponsabilité (http://www.huffingtonpost.fr/corinne-lepage/la-triple-irresponsabilite-du-nucleaire-francais_b_8981 440.html): 1. permet de s'abstraire des règles de sécurité qui rendent probablement impossible le feu vert de l'Autorité de Sureté Nucléaire à l'EPR de Flamanville et dégager de toute responsabilité de l'exploitant comme l'organisme tiers chargé du contrôle du fait de la délivrance de cette dérogation. Et cette possibilité concerne bien évidemment l'EPR de Flamanville dont la cuve et le couvercle du réacteur ont été jugés si ce n'est défaillants, du moins ne répondant pas aux exigences de sécurité telles qu'elles existaient en 2015, mais aussi tous les réacteurs soumis au grand carénage. Cela signifie très clairement que le gouvernement vient de mettre sur la tête de tous nos concitoyens un double risque: le risque d'accident nucléaire puisque les règles de sécurité, qui sont pourtant antérieures aux stress tests (2005) ne sont pas respectées -et sauf à être totalement stupide, personne ne peut croire que l'existence de ces règles est inutile- et le risque financier puisque l'exploitant comme l'organisme de sûreté se déclareront non responsables, car aucune attestation de conformité n'étant signée par eux, cela signifie très clairement qu'ils reconnaissent par avance l'absence du respect des règles de sécurité. 2. La seconde irresponsabilité est d'ordre financier et industriel, dans la mesure où la volonté de continuer à investir massivement dans le nucléaire, puits sans fonds, est à la fois très onéreuse et à contre-courant. Le démembrement d'Areva, rendu inévitable par une situation financière quasi désespérée impose des choix cornéliens, un coût financier pour l'Etat considérable (2-3 milliards) et une fragilisation d'EDF (obligation faite à EDF de racheter une partie d'Areva soulève beaucoup plus de difficultés qu'elle n'apporte d'avantages). 3. cécité absolue sur la transformation rapide à laquelle nous assistons. L'envol du renouvelable, la baisse historique des coûts de production de l'éolien et du solaire, les progrès très rapides du stockage en particulier avec le système volt/gaz/volt et la baisse exponentielle du coût des batteries (voir le système Tesla) changent très rapidement la donne. |
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http://multinationales.org/Nucleaire-francais-la-culture-de
5 JUILLET 2011 PAR IVAN DU ROY Alors que plane l’ombre de Fukushima, un député PS et un sénateur UMP remettent en cause le principe de la mise en concurrence du secteur de l’énergie qui prévaut aujourd’hui en Europe. Sécurité des centrales mise à mal par le recours à la sous-traitance, un chantier EPR où opacité et dissimulation règnent, manque de formation des personnels ou encore absence de suivi médical d’une partie des ouvriers exposés aux radiations… Telles sont les conclusions d’un rapport parlementaire sur la sécurité nucléaire en France. Cet article a été publié initialement par Basta ! le 5 juillet 2011. EDF et Areva suivent-ils le même chemin que Tepco (Tokyo Electric Power), l’opérateur japonais en charge de la centrale de Fukushima ? Le député PS Christian Bataille (Nord) et le sénateur UMP Bruno Sido (Haute-Marne) viennent de remettre leur rapport d’étape sur la sécurité nucléaire. Les élus ne sont pas tendres avec les deux principaux acteurs de la filière. Ils remettent clairement en cause le recours « à la sous-traitance en cascade » qui « aboutit à une opacité, potentiellement dommageable pour la sûreté des installations », écrivent-ils. « À l’occasion de nos visites de sites, dans certains cas extrêmes, jusqu’à huit niveaux de sous-traitants peuvent ainsi se superposer. Une telle situation s’avère particulièrement préoccupante, en terme de sûreté, puisqu’elle conduit à une dilution extrême des responsabilités et s’avère difficile à identifier. » Si l’on en croit la documentation d’EDF sur les métiers du nucléaire (voir ci-dessous), ce sont « 20.000 fournisseurs tous métiers confondus » qui composent la sous-traitance. Mieux vaut tard que jamais, les deux élus s’inquiètent des conditions de travail de ces prestataires extérieurs, en particulier de l’absence de suivi médical pour ces ouvriers et techniciens régulièrement confrontés aux radiations. « En effet, alors que les personnels EDF ou Areva sont soumis au contrôle du médecin du travail de leur établissement, ceux des sous-traitants dépendent, sauf exception, pour leur suivi médical, d’un médecin du travail basé dans leur lieu d’origine, ce qui peut constituer un obstacle majeur à un contrôle radiologique efficace. » Les batailles menées depuis quelques mois par des syndicalistes et des chercheurs n’auront pas été totalement vaines. Les rapporteurs suggèrent ainsi la création sur chaque site d’un médecin du travail référent « chargé de la vérification du dossier de santé des intervenants ». Une première avancée mais qui ne résout pas la question, loin de là. Car l’évaluation de la limite maximale d’exposition, fixée en Europe à 20 millisieverts par an (mSv, mesure l’impact biologique aux rayonnement ionisants), commence à être fortement remise en cause. Exposition à la radioactivité : des normes à réévaluer « En matière de cancer, la norme n’est qu’une garantie de risque acceptable, sachant que les rayonnements sont nocifs, même à faible dose. Ainsi, une exposition de 20 mSv par an pendant cinquante ans provoque un risque de décès par cancer accru de 15%, selon une enquête du Centre international de recherche sur le cancer (Circ). Rappelons, pour comparaison, que la norme d’exposition à l’amiante actuellement en vigueur entraîne une augmentation de risque de décès par cancer de 0,5% sur la même période », explique le journaliste Jean-Philippe Desbordes dans le magazine Santé et Travail (juillet 2011). Annie Thébaud-Mony, directrice de recherche à l’Inserm, propose en conséquence l’instauration d’une norme quotidienne, ce qui est normalement la règle pour les autres types de cancérogènes, comme les pesticides. De son côté, la CGT réclame un abaissement du seuil annuel à 10 mSv. La mission parlementaire sur la sécurité nucléaire n’a, pour l’instant, pas jugé bon de s’intéresser à ces normes et à la manière de les calculer. Leur proposition de médecin du travail référent ne règle pas non plus le chantage à l’emploi dont font l’objet les nomades du nucléaire, tentés de masquer les doses de radioactivité qu’ils subissent par crainte de se voir retirer leur contrat, leur emploi et donc leurs revenus. Une culture de la sûreté en voie de disparition Le recours massif à la sous-traitance pose une autre question : celle de la perte de « la culture de la radio protection ». Comme toutes les anciennes grandes entreprises publiques, EDF est une entreprise vieillissante : entre 2010 et 2015, 22.000 employés de l’électricien prendront leur retraite, sur un effectif total de 65.000. Soit un salarié sur trois ! C’est tout un savoir qui s’en va, et qui fera cruellement défaut en cas d’incident au sein d’une centrale. Ce que ne manquent pas de relever les élus : « Le remplacement de ces personnels pose une double difficulté. D’une part, l’offre de formation aux métiers du nucléaire reste très insuffisante en regard des besoins (…). D’autre part, le caractère très spécialisé de certains de ces métiers nécessite de prolonger la formation initiale par un compagnonnage sur plusieurs années, permettant d’acquérir une parfaite maîtrise des gestes techniques et une complète connaissance des matériels. » L’intervention de ces multiples prestataires sur les 58 réacteurs français – avec un turn-over de 20% selon le secrétaire du CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) de la centrale de Cruas (Ardèche) – ne contribue pas à transmettre l’histoire d’une centrale, de ses incidents et de ses points faibles. Alors même qu’elles vieillissent, que les « anomalies » vont se multiplier du fait de l’usure des matériaux, et que le gouvernement envisage de prolonger l’activité des réacteurs les plus anciens, comme le réacteur n°1 de Fessenheim, qui rempile pour dix ans malgré une accumulation d’incidents. Ce qui n’est pas sans rappeler l’autorisation donnée par l’agence de régulation nucléaire japonaise, l’équivalent de l’ASN, de prolonger pendant dix ans supplémentaire l’exploitation du plus ancien réacteur de Fukushima. Et ce, le 7 février, un mois avant la catastrophe, et après avoir signalé des craquelures sur le groupe électrogène de sûreté du réacteur n° 1 de Fukushima Dai-Ichi. Comme si, malgré les alertes de salariés, d’associations ou des élus, un terrible puzzle se mettait en place pour que, après les États-Unis, l’URSS et le Japon, la France connaisse sa propre catastrophe nucléaire. Vers la fin de la sous-traitance ? La limitation du recours à la sous-traitance est donc urgente, comme le recommandent le député et le sénateur. Mais ni EDF ni Areva n’en prennent pour l’instant le chemin. EDF a financé la mise en place d’une filière pour les métiers de la « maintenance nucléaire » (du CAP au BTS en chaudronnerie industrielle ou en électrotechnique). Derrière la devise « être plus performant pour mieux servir », l’opérateur y vante les débouchés qu’ouvrent ses diplômes pour trouver un emploi chez… ses prestataires. Rappelant que ceux-ci sont en charge de 80% des activités liées à la sûreté, à la sécurité ou à la radioprotection. Areva souhaite également augmenter le recours à la sous-traitance. Le producteur d’uranium envisage par exemple de confier l’approvisionnement en énergie de son usine de retraitement des déchets nucléaires de La Hague à une filiale de Veolia. Un EPR bricolé ? Le problème se pose encore plus crûment pour le nouveau réacteur EPR en construction à Flamanville (Manche). Christian Bataille et Bruno Sido, qui sont très loin de souhaiter la sortie du nucléaire, pointent du doigt le chantier et sa totale opacité. « Un certain nombre d’intervenants, dont l’ASN (Autorité de sûreté du nucléaire), ont fait part de la perte de savoir-faire dans la construction de réacteurs, notamment chez les fournisseurs, sur des points très techniques tels que des soudures au niveau du liner et des adaptateurs du couvercle de la cuve. » Cette même cuve censée être encore plus résistante à une éventuelle fusion du cœur. L’ASN avait constaté en 2010 qu’une soudure sur quatre n’était pas conforme aux critères de qualité. « Il nous a été impossible d’obtenir une évaluation crédible du coût de la sécurité dans l’EPR. Vos rapporteurs en ont notamment fait la demande directe lors de sa visite du chantier de Flamanville, sans qu’une réponse satisfaisante leur soit apportée », témoignent-ils. « Le nucléaire, une énergie compétitive pour préparer l’avenir », vantent pourtant les brochures EDF. Tellement compétitive que l’opérateur est incapable d’en chiffrer le coût… Les élus s’y sont essayés, et constatent une augmentation de 50% en cinq ans du prix du réacteur de 3e génération érigé à Flamanville passant de 3 milliards d’euros en 2003 à 5 milliards , « si ce n’est plus », en 2008. Côté pile : l’ASN a recensé 112 accidents du travail en 2010, dont un tiers n’avaient pas été déclarés par Bouygues, en charge des travaux. Quatre enquêtes préliminaires pour travail dissimulé, sous-déclaration des accidents de travail et décès de deux employés sur le chantier sont menées par le parquet de Cherbourg (lire aussi l’article de Novethic sur le sujet). Face à ce gigantesque risque de la perte de sûreté dans la filière nucléaire, les deux élus recommandent que « l’État prenne toutes les dispositions qui apparaîtront nécessaires pour, d’une part, conserver sur le long terme une complète maîtrise des entreprises de la filière nucléaire française et, d’autre part, faire reconnaître au niveau européen, le caractère spécifique de la filière nucléaire qui ne peut répondre à l’exigence de concurrence imposée dans le secteur de l’énergie par les traités. » En clair : un virage à 180 degrés après deux décennies de dérégulation en Europe. Et une remise en cause de la loi transformant EDF en société anonyme, votée en août 2004 alors qu’un certain Nicolas Sarkozy était ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie. Les six représentants de l’État et les six représentants syndicaux qui siègent au Conseil d’administration d’EDF obligeront-ils Henri Proglio à ne plus sous-traiter la sécurité ? Ivan du Roy — Photo : bbcworldservice Consulter le rapport d’étape de la de la mission parlementaire sur la sécurité nucléaire, la place de la filière et son avenir : Message modifié le 10/10 à 13:43:12 par Lorran. |
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Message modifié le 15/11 à 12:27:06 par Lorran. |
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le 09/12/2016 à 16:20:37
http://www.sortirdunucleaire.org/Gestion-chaotique-a-la-centrale-nucleaire-de
COMMUNIQUÉ COMMUN DU RÉSEAU “SORTIR DU NUCLÉAIRE“ ET DU GROUPE LOCAL SORTIR DU NUCLÉAIRE TOURAINE Communiqué du 6 décembre 2016 twitterfacebook Le Tribunal de police de Tours vient enfin de condamner EDF pour sa gestion chaotique de la sûreté à la centrale nucléaire de Chinon (Indre-et-Loire), suite à une plainte déposée en avril 2014 par le Réseau “Sortir du nucléaire“. Les trois infractions retenues ne constituent que la partie émergée de l’iceberg des nombreuses aberrations observées sur ce site, qui mettent en danger riverains et travailleurs. EDF et le directeur de la centrale de Chinon condamnés pour trois infractions EDF et le directeur de la centrale ont été condamnés à payer respectivement 7000€ et 2750€ d’amende pour trois infractions. Ils ont d’abord été reconnus coupables de la mauvaise gestion des substances chimiques destinés à l’entretien des installations. En effet, les acides et les bases, produits pourtant incompatibles dont le mélange peut déclencher de violentes réactions, étaient rangés dans la même armoire, au mépris des règles de sécurité les plus élémentaires ! Cette négligence est d’autant plus inquiétante que la gestion du local concerné est sous-traitée à un prestataire extérieur. Le tribunal a également sanctionné l’absence de traçabilité de certaines opérations de maintenance, les contrôles systématiques étant remplacés au dernier moment par de simples sondages sans que ce changement ne soit formalisé. Enfin, EDF et le directeur ont été sanctionnés pour une importante fuite de bore (produit destiné à freiner les réactions nucléaires) sur une canalisation. Alors que la réglementation européenne considère cette substance comme « hautement préoccupante en raison de ses caractéristiques reprotoxiques », l’avocat d’EDF avait osé effectuer un parallèle avec une simple trace de calcaire ! Des infractions révélatrices d’une mauvaise gestion généralisée Les trois infractions retenues par le tribunal ne constituent qu’une petite partie des faits évoqués dans un rapport publié fin 2013 par l’Autorité de sûreté nucléaire, suite à une série d’inspections effectuées sur le réacteur B1, arrêté pour travaux de maintenance. Dalle en béton menaçant de s’effondrer, travailleurs ballotés d’un chantier à l’autre sans recevoir les informations requises sur les risques, inondations internes chroniques, refus d’accorder des équipements de protection contre les radiations… Au total, le Réseau “Sortir du nucléaire“, qui avait déposé plainte en avril 2014, avait recensé dans ce rapport une quinzaine d’infractions à la réglementation des installations nucléaires et au droit du travail. Le Réseau “Sortir du nucléaire“ et le groupe local Sortir du nucléaire Touraine espèrent que cette condamnation attirera l’attention sur la menace constante que la centrale fait peser sur les riverains et les travailleurs. C’est à juste titre que Chinon, placée en surveillance renforcée pendant cinq ans, demeure en « surveillance particulière spécifique ». Les inquiétudes des associations restent fondées, comme en attestent des défauts persistants dans le suivi des travaux de maintenance [1] et la contamination récente d’un sous-traitant [2]. Dans ces conditions, la prolongation de la durée de fonctionnement de la centrale engagée par EDF est particulièrement inacceptable. Aux dysfonctionnements résultant d’une conduite chaotique des travaux, va s’ajouter le vieillissement des équipements. Certains, déjà obsolètes, ne sont pas remplacés [3] ; d’autres, comme les cuves des réacteurs, ne sont ni remplaçables ni réparables. Plutôt que d’engloutir des milliards dans le rafistolage des réacteurs, la sagesse exigerait de fermer au plus vite cette centrale vieillissante. Pour en savoir plus : Consulter le rapport d’inspection de l’Autorité de sûreté nucléaire Voir le dossier juridique : http://www.sortirdunucleaire.org/Chinon-inspections Lire notre article : Centrale nucléaire de Chinon : une visite décennale sous haute tension Contacts presse : Maître Benoist Busson - 06 72 12 72 47 Dominique Boutin – 06 86 71 59 31 Jean-Claude Bragoulet - 06 15 03 29 24 Chargée de communication : Charlotte Mijeon - 06 64 66 01 23 Notes [1] Comme le rappellent des lettres d’inspection datées de 2015 et 2016, « …les inspecteurs ont constaté un certain relâchement concernant la qualité des dossiers d’interventions présentés (analyses de risques non homogènes sur des chantiers identiques, dossiers de suivi d’intervention incomplètement renseignés, régimes de travail radiologiques incomplet...) » (lettre du 30 juillet 2015) ; « la gestion des dossiers de suivi d’intervention doit être plus rigoureuse » (lettre du 4 juillet 2016) [2] Voir sur le site de l’ASN : https://www.asn.fr/Controler/Actualites-du-controle/Avis-d-incident-des-installations-nucleaires/Con tamination-corporelle-externe3 [3] Faits cités dans un article du Figaro http://premium.lefigaro.fr/actualite-france/2015/10/08/01016-20151008ARTFIG00232-la-surete-de-la-cen trale-nucleaire-de-chinon-en-question.php |
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le 09/12/2016 à 16:48:52
https://reporterre.net/Au-coeur-de-la-crise-nucleaire-des-dizaines-de-fraudes-et-d-irregularites-da ns 7 décembre 2016 / Émilie Massemin (Reporterre) Au coeur de la crise nucléaire, des dizaines de fraudes et d'irrégularités dans une usine Areva Un audit réalisé au Creusot Forge, l’usine du groupe Areva où sont forgés les gros composants des centrales nucléaires, a révélé l’existence d’irrégularités dans 430 dossiers « barrés ». Certaines s’apparentent à des falsifications. Deux réacteurs sont toujours à l’arrêt depuis ces découvertes et 6.000 dossiers d’archive sont encore en cours d’examen. Cet article est le troisième d’une série de quatre que Reporterre consacre au nucléaire français. Nous publions également une carte du parc nucléaire, détaillant la situation centrale par centrale. . 1 « Des coupures de courant se préparent en cas d’hiver rigoureux ». . 2 « Sept réacteurs nucléaires autorisés à redémarrer, malgré un défaut dans leur acier ». LA CARTE EST DISPONIBLE ICI « C’est un iceberg dont nous nous apercevons qu’il prend des proportions impensables hier encore. » Jean-Claude Delalonde, président de l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (Anccli), a tiré la sonnette d’alarme devant les participants de la 28e conférence des commissions locales d’information (CLI), le 16 novembre dernier. En avril 2016, 430 dossiers de fabrication irréguliers — des dossiers « barrés » — ont été découverts dans les archives de l’usine Areva du Creusot (Saône-et-Loire), où sont forgés les gros composants en acier des réacteurs nucléaires. Dans ces dossiers doivent être indiquées toutes les propriétés chimiques et mécaniques de la pièce – des caractéristiques décisives pour la sûreté des installations. L’usine du Creusot doit en fournir une copie à EDF et à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et en archiver un exemplaire. Problème : certains des dossiers barrés exhumés des placards du forgeron n’affichent pas les mêmes informations que les exemplaires transmis au client et au gendarme du nucléaire... 88 de ces écarts concernent des composants de réacteurs en fonctionnement forgés entre 1965 et 2012 et 19 le futur réacteur EPR de Flamanville 3. Pour Fessenheim 2 et Gravelines 5, les aberrations sont si préoccupantes que les réacteurs sont maintenus à l’arrêt. JPEG - 17.2 ko Un dossier « barré ». PDF - 431.7 ko La liste des irrégularités détectées au sein de Creusot Forge. En juillet 2016, coup de tonnerre : d’autres anomalies ont été mises en lumière dans des documents qui ne présentent pas le double trait caractéristique des dossiers barrés. Ce sont donc désormais plus de 6.000 dossiers qu’Areva va devoir examiner, à la recherche d’omissions ou de résultats falsifiés. « C’est une forme d’évidence pour moi, on va trouver d’autres anomalies ou irrégularités », a déjà prévenu le président de l’ASN, Pierre-Franck Chevet, lors d’une audition devant l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), le 25 octobre. Le feuilleton des arrêts forcés de réacteurs risque ainsi de connaître de nouveaux rebondissements. Comment ces irrégularités ont-elles été découvertes ? En 2015, quand l’ASN apprend que l’acier de la cuve du futur EPR de Flamanville présente une concentration excessive de carbone, elle demande à Areva de réaliser un audit dans son usine du Creusot, où la pièce a été fabriquée. Cette requête est appuyée par EDF, dont le centre d’expertise en fabrication et métallurgie, le Cèdre, s’est inquiété de nombreuses anomalies dans les essais de traction exécutés par le forgeron. « Ces essais consistent à étirer une tige de métal un peu plus grosse qu’une cigarette entre deux machines pour mesurer la résistance de l’acier », précise Jean-Luc Mercier, représentant CGT, qui travaille au laboratoire de l’usine du Creusot. D’abord mené en interne en 2015, l’audit est confié en 2016 au cabinet indépendant Lloyd’s Register Apave. Ce travail permet de découvrir l’existence des 430 dossiers affichant, « dans la marge, une double-barre qui met en évidence que ce dossier révèle des écarts », a décrit Rémy Catteau, directeur des équipements sous pression à l’ASN, le 25 octobre à l’Opecst. Ces documents ont été examinés un par un pour identifier la nature des irrégularités. En parallèle, Areva a « procédé à un examen par sondage des dossiers de fabrication qui ne comportaient pas les fameuses barres, a indiqué le PDG d’Areva NP, Bernard Fontana, aux parlementaires. Ce sondage a mis en évidence des écarts similaires à ceux révélés lors de l’examen des dossiers barrés. » D’où la nécessité de décortiquer tous les dossiers concernant des composants nucléaires, soit plus de 6.000 documents. « Il faut purger le passé », a admis M. Fontana. Les irrégularités constatées sont-elles graves ? Cela dépend. « Il s’agit, dans beaucoup de cas, de manque de rigueur. Mais aussi, dans quelques cas, de manquements graves à la culture qualité, qui ont conduit à ne pas déclarer et traiter des écarts selon les procédures qui auraient dû être appliquées », a analysé le PDG d’Areva NP. Trois cas sont graves : Fessenheim 2, Flamanville 3 et Gravelines 5. À Fessenheim 2, c’est la virole basse du générateur de vapeur qui pose problème. « Les règles de l’art du forgeage imposent de couper une partie du lingot d’acier d’où est issue la virole, où se concentrent toutes les impuretés », a décrit M. Catteau. Or, les ouvriers n’ont pas effectué cette opération indispensable appelée « chutage ». JPEG - 123.2 ko Présentation de l’anomalie sur le générateur de vapeur de Fessenheim 2 à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques avec la démonstration de l’opération de « chutage » d’une masselotte. Dans le dossier de fabrication du Creusot, on trouve une fiche incident qualité datée de 2008 qui précise qu’il « n’est pas possible de couper la partie qu’on doit couper, parce que la longueur de la virole est trop courte ». Pourtant, dans cette même fiche incident, il est préconisé de « poursuivre la fabrication ». Résultat, « cette partie, qui recueille les éléments indésirables, se retrouve dans la pièce finale. Ça a des conséquences potentielles pour la sûreté qui peuvent être majeures », s’est alarmé M. Catteau. JPEG - 113.4 ko Extrait du dossier barré concernant la virole de Fessenheim 2. De ce fait, l’ASN a suspendu l’autorisation du générateur de vapeur qu’elle avait accordée à Fessenheim 2 en 2012. EDF mène depuis mai 2016 une série de tests visant à démontrer que le générateur est apte à fonctionner en toute sûreté. « Nous sommes confiants sur le fait de pouvoir présenter un dossier robuste à l’ASN avant la fin de cette année pour demander le redémarrage du réacteur », a assuré Dominique Minières, directeur exécutif chargée du parc nucléaire et thermique d’EDF, le 25 octobre à l’Opecst. Même falsification concernant le générateur de vapeur de Flamanville 3 : les ouvriers du Creusot n’ont coupé que 10 % du lingot, alors que le dossier de fabrication remis à l’ASN affirme que 23 % ont été supprimés. Concernant le nouveau générateur de vapeur qui devait être installé sur Gravelines 5, les valeurs obtenues aux tests de résilience indiquées dans le dossier de fabrication archivé au Creusot — 42-42-165 joules — n’ont rien à voir avec les valeurs transmises à l’ASN — 98-120-165 joules. « Sachant que le requis réglementaire pour ce type d’essai est de 60 joules », a précisé M. Catteau. Le générateur de vapeur n’a pas été installé et Gravelines 5 est toujours à l’arrêt. JPEG - 95.4 ko Comparatifs des dossiers Creusot et ASN concernant le générateur de vapeur de Gravelines 5. Comment en est-on arrivé là ? « Des interviews de collaborateurs actuels et anciens de Creusot Forge sont organisés », a précisé M. Fontana. D’après Les Échos, cette opération « repentis » (pas de sanctions pour ceux qui parleront) n’a rencontré qu’un succès limité. Les tests et les contrôles qui permettent de remplir les dossiers de fabrication sont réalisés à différentes étapes du forgeage. Les lingots d’acier arrivent de l’usine voisine d’Industeel (groupe ArcelorMittal). « On commence par faire des prélèvements pour vérifier la bonne qualité de l’acier », explique Jean-Luc Mercier, de l’usine du Creusot. Ensuite, la pièce est forgée à chaud dans un four puis moulée sur une énorme presse dans un « atelier à chaud ». À l’issue de cette étape, la pièce est une nouvelle fois analysée : « On vérifie qu’il n’y a pas de fissure, s’il n’y a pas de poche de carbone qui stagne à un endroit précis, etc. » La pièce file ensuite à l’usinage dans un autre atelier, « sur de grosses machines qui enlèvent tout le surplus de matière et vont chercher la pièce au cœur du métal ». Après d’ultimes contrôles, radio notamment, elle part à une trentaine de kilomètres de là, à l’usine Areva de Saint-Marcel, où elle est assemblée avec d’autres éléments pour former le composant final, un générateur de vapeur, par exemple. « Chaque composant fait l’objet d’un dossier de suivi qui assure la traçabilité des opérations de fabrication de la pièce, récapitule David Emond, directeur de la Business Unit Composants d’Areva NP. Des essais permettent de vérifier les caractéristiques mécaniques et chimiques de l’acier. Nos procédés de contrôle s’appuient sur un ensemble de techniques non destructives — ultrasons, courants de Foucault, magnétoscopie, télémétrie laser — et destructives — essais de traction, essais de résilience, dureté, essais Pellini. » Des dispositifs de surveillance sont normalement prévus pour vérifier que ces essais sont correctement effectués. « Deux types d’opérations de surveillance sont réalisés dans le cadre de la fabrication d’un composant : la revue documentaire et les inspections en atelier. À cela s’ajoute l’inspection de nos clients et des autorités de sûreté, ou des organismes qu’elles mandatent », poursuit M. Emond. Jean-Luc Mercier assure que depuis quelques années, les tests de concentration de carbone et d’étirement sont effectués par des machines reliées à des ordinateurs, qui enregistrent automatiquement les résultats : « Les opérateurs n’ont pas la possibilité de modifier les valeurs. Que les résultats soient bons ou mauvais, ils sont directement envoyés à la hiérarchie. » Selon lui, des falsifications comme celle repérée dans le dossier de fabrication du générateur de vapeur de Gravelines 5 ne seraient plus possibles au niveau du laboratoire. Pour expliquer les anomalies décelées dans les essais de traction, il invoque « la machine, insuffisamment fixée au sol, qui avait un petit sursaut quand le métal se rompait. Ça faussait les résultats par rapport aux machines des contre-expertises, qui, elles, étaient bien fixées ». Le problème a été découvert « il y a un peu plus d’un an », précise-t-il. Plus de 4.000 essais de traction sont à reprendre par Areva, une opération qui pourrait durer jusqu’à 2018. Enfin, concernant l’absence ou l’insuffisance de « chutage », le représentant syndical pointe « la décision prise il y a quelques années par la direction de diminuer la quantité de matière première achetée. À l’époque, nous avions tiré la sonnette d’alarme en disant que c’était très dangereux. Pour avoir la meilleure qualité, ne faudrait-il pas commander des lingots de 100 tonnes au lieu de 90 tonnes, pour que la pièce de 40 tonnes qui en est tirée soit de la meilleure qualité ? » Selon Les Échos, le groupe aurait lancé un programme avec Industeel pour mettre au point un nouveau type de lingot d’acier, mais qui ne sera disponible qu’à partir de 2018. Comment Areva s’organise-t-elle pour gérer la crise ? La première phase de traitement des dossiers dits « barrés » est aujourd’hui terminée pour les pièces nucléaires. « Cette première phase a mobilisé près de 80 personnes, ingénieurs et techniciens, spécialistes de la qualité, des calculs, de la métallurgie et de matériaux... qui depuis avril 2016, analysaient ces dossiers », raconte David Emond. Première besogne, examiner page par page les 6.000 dossiers de fabrication archivés au Creusot, « soit plus de 2,4 millions de pages », selon les calculs de M. Emond. « La direction a monté une task force, décrit Jean-Luc Mercier, délégué syndical CGT au Creusot Forge. Énormément de monde a été recruté en externe. On va en avoir au moins jusqu’à la fin de l’année prochaine. » Selon Les Échos, cinquante personnes sont à pied d’œuvre et autant doivent être recrutées. Areva a installé plusieurs centaines de mètres carrés de préfabriqués de bureaux dédiés à ces investigations à côté de l’usine. Ces dossiers « seront analysés tout au long de 2017, soit environ 18 mois de travail, par un plateau projet situé à La Défense. Ce sont au total plus d’une centaine de personnes, personnels Areva NP et sous-traitants, qui travaillent aujourd’hui sur ces dossiers, précise M. Emond. Leurs domaines d’intervention sont l’analyse des dossiers d’archives, la caractérisation des constats d’écarts et la rédaction des justificatifs techniques, et le traitement des écarts suivi par des fiches d’anomalies ou de non-conformité ». JPEG - 85.3 ko Le centre technique d’Areva NP au Creusot, en septembre 2012. « L’ASN vient régulièrement contrôler le déroulement du travail », précise M. Mercier. Le 16 novembre, Olivier Gupta, directeur général de l’ASN, indiquait à la 28e conférence des commissions locales d’information (CLI) que « ces irrégularités sont un des dossiers phares de l’année. Depuis 2016, 50 hommes par jour sont mobilisés pour des inspections sur site. Nous instruisons chacune des irrégularités avec l’IRSN [’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire], en donnant la priorité aux pièces qui présentent le plus d’enjeux de sûreté ». Au-delà de l’examen de tous les dossiers archivés, une réflexion sur l’organisation du travail est en cours pour éviter que la situation ne se reproduise. « On a décidé de renforcer un programme qualité, a annoncé Dominique Guilloteau, directeur sûreté, santé, sécurité et développement durable d’Areva, à la 28e conférence des CLI. Il faut renforcer tout ce qui est détection et traitement des écarts et renforcer le contrôle interne en mettant en place des doubles-contrôles à tous les stades de fabrication. » L’organisation de la production se trouve elle aussi modifiée : le laboratoire où sont réalisés les premiers tests sur le lingot va déménager au plus près de la forge, pour éviter que des « coupons » (échantillons sur lesquels sont réalisés les tests) ne soient égarés au cours de longues allées et venues. « Une réflexion est en cours pour savoir s’ils vont augmenter la quantité de matière première achetée pour éviter les chutages insuffisants », poursuit M. Mercier. Quelles conséquences la découverte de ce scandale a-t-elle déjà eu sur l’usine ? Fin octobre, l’ASN a fait un signalement au procureur de la République. « C’est désormais à lui de décider des suites à donner à cette affaire », a dit Olivier Gupta lors de la 28e conférence des CLI. EDF a pour sa part préféré « faire jouer les clauses contractuelles. Le travail est en cours », précise-t-on chez l’électricien. Les impacts commerciaux ne se sont pas fait attendre : début novembre, Creusot Forge a vu l’électricien sud-africain Eskom rejeter la quinzaine de viroles qu’elle avait forgées pour l’unique centrale nucléaire du pays, Koeberg. « Il y avait des problèmes de qualité, alors le client a décidé de les faire refabriquer au Japon » par Japan Steel Works (JSW), regrette M. Mercier. Creusot Forge n’avait pas besoin de ces difficultés supplémentaires. Après une faillite retentissante de sa maison-mère, Creusot-Loire, en 1984, la forge du Creusot et sa presse avaient été rachetées par Arcelor. Ensuite, elle a intègré, en 2003, le groupe France-Essor, de Michel-Yves Bolloré (le frère de Vincent), puis le groupe Areva. Ce dernier, en proie à de graves problèmes financiers (2 milliards d’euros de perte en 2015 pour un chiffre d’affaires de 4,5 milliards) et dans l’optique d’une restructuration de ses activités, a récemment lancé un plan de départs volontaires dans l’usine. 71 personnes devraient quitter Creusot Forge d’ici à la fin 2017 sur un effectif de 275 CDI. « Avec ce plan de départs volontaires, on a des compétences qui partent. On nous demande de produire de la meilleure qualité avec moins de salariés. Enfin, les commandes ne sont plus là, même si le projet d’Hinkley Point devrait nous apporter un peu de travail. Comment va-t-on faire ? » s’inquiète M. Mercier. L’AUTORITÉ DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE DOIT-ELLE REVOIR SON SYSTÈME DE CONTRÔLE ? « Il est clair que ni les contrôles internes, Areva sur le Creusot, EDF sur Areva, ni les nôtres, historiquement, n’ont vu ce qui s’apparente à des falsifications. Je ne pense pas que nos systèmes soient capables, si on ne les change pas, de voir ce genre de dérive. » Pierre-Franck Chevet, le président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), l’a reconnu le 25 octobre devant l’Opesct : le gendarme du nucléaire s’est montré incapable de déceler les irrégularités au Creusot, qui concernent des pièces forgées entre 1965 et 2012 — soit 47 ans de fabrication. Plusieurs niveaux de contrôle sont censés garantir la sûreté du parc nucléaire. Areva, le fournisseur, doit vérifier la qualité de la fabrication dans ses usines. EDF, l’exploitant des centrales, doit surveiller Areva et ses sous-traitants. En fin de chaîne intervient le contrôle de l’ASN : inspections (environ 2.000 par an) annoncées ou inopinées sur les installations nucléaires et chez les fabricants, examen de documents et de données fournis par l’exploitant. Un système fondé sur la confiance et la bonne foi qui a montré ses limites. « Nos inspections ne sont pas des perquisitions. Nous ne partons pas du principe que les données transmises sont frauduleuses », a admis M. Chevet dans une interview. Comment faire évoluer la surveillance pour éviter que cette situation ne se reproduise ? « Nous allons lancer un groupe de travail pour renforcer nos pratiques de contrôle, a poursuivi M. Chevet. Nous pourrions, par exemple, imposer la réalisation de contrôles par des laboratoires extérieurs. » Quant aux commissions locales d’information (CLI), elles réclament un droit de regard plus important sur ces modalités de contrôle pour éventuellement pouvoir éventuellement lancer l’alerte. « Pour rétablir la confiance, nous pourrions imaginer que les CLI accompagnent, en tant qu’observateurs, les inspections de l’ASN », a suggéré Michel Eimer, président de la CLI de Saint-Laurent-des-Eaux. Vous avez aimé cet article ? Soutenez Reporterre. Lire aussi : La situation du nucléaire français inquiète l’Autorité de sûreté Source : Émilie Massemin pour Reporterre Photos : ASN : - Télécharger document ASN d’où proviennent les images : PDF - 852.7 ko ASN - Présentation à |
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Les dernières semaines ont été fertiles en découvertes sur l’état réel du parc nucléaire français. On savait déjà que la cuve du réacteur EPR de Flamanville présentait des défauts susceptibles d’en interdire l’emploi : des concentrations trop élevées de carbone dans le couvercle et le fond de cuve qui, fragilisant l’acier, risquaient de conduire à la rupture de la cuve en cas de choc thermique. Cette question évidemment cruciale pour l’avenir de l’EPR de Flamanville est en cours d’instruction par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) qui rendra son diagnostic et ses prescriptions en mars prochain. 18 réacteurs défectueux Mais ces dernières semaines, on a également appris que ce défaut de fabrication touchait aussi 18 des réacteurs actuellement en service, au niveau de la cuve ou des générateurs de vapeur. L’ASN a donc demandé l’arrêt provisoire de ces réacteurs afin de faire un diagnostic de la gravité de la situation et signifié l’interdiction du redémarrage du générateur de vapeur d’un des réacteurs de Fessenheim. En cause, la forge du Creusot, propriété d’Areva, mais aussi une entreprise japonaise qui pourrait ne pas avoir envoyé en France ses meilleurs produits. Une situation catastrophique C’est évidemment une catastrophe sur plusieurs plans. D'abord, près d’un tiers du parc nucléaire se retrouve à l’arrêt à l’approche de l’hiver, soit plus de 20 % de la capacité totale de production française. C'est un véritable casse-tête pour EDF. Il n’est pas la peine d’aller chercher plus loin la décision du gouvernement de renoncer à son engagement solennel d’établir un prix plancher du CO2 applicable aux centrales à charbon. Ce serait évidemment pénalisant pour l’entreprise nationale déjà bien fragilisée sur le plan financier qui a en toute hâte remis en route les centrales à charbon qu’elle possède encore. Ensuite, cette découverte de défauts sur des matériels aussi importants que les cuves, les générateurs de vapeur ou les pressuriseurs est d’autant plus grave que ces défauts sont formellement exclus des hypothèses des différents scénarios accidentels. Ces matériels sont en effet censés obéir à un principe « d’exclusion de rupture ». La découverte de ces défauts de fabrication remet donc en cause l’architecture et la philosophie même des calculs qui conduisent à l’affichage de probabilités d’accidents graves ou majeurs. Que veulent dire en effet ces calculs si l’on découvre des défauts graves et irréparables sur les matériels les plus critiques et censés être parfaits ? Areva pourrait avoir tranquillement falsifié les certificats de conformité requisMais il y a encore plus grave. L’ASN, inquiète de cette avalanche de découvertes a diligenté une enquête à Areva pour vérifier la conformité de centaines de pièces avec les spécifications demandées. Et là, nouvelle surprise, la découverte de plusieurs centaines de « dossiers barrés » dans lesquels Areva pourrait avoir tranquillement falsifié les certificats de conformité requis. Une pratique semble-t-il courante dont on a bien du mal à imaginer qu’elle provienne d’une initiative isolée. L'inimaginable s'est produit Anomalies et falsifications sur des matériels supposés parfaits : tout y est. Comme le disait en 2011 Jacques Repussard, alors directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), « Il faut imaginer l’inimaginable ». Avec la moitié du parc nucléaire français en situation de sûreté nucléaire dégradée, nous y sommes et c’est très grave. Avant ces « découvertes », le président de l’autorité de sûreté nucléaire déclarait : « Un accident nucléaire majeur ne peut être exclu nulle part ». Dans la situation actuelle, il est de moins en moins exclu en France. Le parallèle avec le Dieselgate saute aux yeux Le parallèle avec le dieselgate allemand saute aux yeux. Des normes techniques non respectées sur des matériels critiques pour la sûreté, des certificats falsifiés en masse pour obtenir le feu vert des autorités, tout y est, mais avec en plus un élément déterminant : ce n’est pas comme en Allemagne sous la direction d’un patron dictatorial de multinationale que ce « nucléogate » se produit, c’est bien dans des entreprises quasi-nationalisées et sous l’égide de l’élite des grands corps techniques français qui se targuent de leur dévouement au pays et de leur honnêteté. Et ceci, semble-t-il, dans la plus totale impunité des dirigeants responsables. De quoi faire réfléchir nos concitoyens sur les limites de notre démocratie… BENJAMIN DESSUS ET BERNARD LAPONCHE |
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10 octobre 2017 Selon un rapport de Greenpeace publié ce 10 octobre 2017, les centrales nucléaires exploitées par EDF possèdent des failles sécuritaires importantes en cas d’attaques ou d’actes malveillants. Ce sont les conclusions rapportées par un panel de sept experts indépendants mandatés par l’ONG et qui pointent la « fragilité des piscines d’entreposage du combustible usé face au risque d’attaques extérieures ». Les centrales belges de Doels et Tihange sont également concernées par les principales conclusions de ce rapport. Une version résumée de ce document sensible a été rendue publique ce 10 octobre. La France et la Belgique font-elles tout pour prévenir les risques liés à de potentielles attaques ou accidents afin de protéger les populations ? Sur la base d’avis d’experts en sûreté nucléaire, sécurité, radioprotection et économie, Greenpeace répond par la négative et souligne au contraire les importantes lacunes en la matière. Pourtant, vu le contexte géopolitique, les centrales nucléaires pourraient être un jour des cibles privilégiées pour des groupes terroristes. La possibilité est prise au sérieux par les autorités puisque de nombreux indices laissent supposer que la possibilité d’une telle attaque a déjà été étudiée par des groupements terroristes, notamment en Belgique. Les piscines d’entreposage du combustible, les oubliées de la sécurité ? Alors que de nombreuses installations nucléaires ont été construites il y a plus de deux décennies, les mesures de sécurité mises en œuvre à l’époque sont-elles encore pertinentes face à l’évolution des menaces ? Il y a plus de 30 ans, c’est principalement le risque d’emballement du cœur des réacteurs qui préoccupait les experts. Aujourd’hui, bien que ce risque n’est pas à négliger, de nouveaux facteurs rentrent en compte. Dans le rapport de Greenpeace, ce sont d’autres structures qui retiennent l’attention des experts mandatés. En effet, les piscines de combustible usé, qui servent de lieu de refroidissement, ne bénéficient pas du même niveau de protection que les réacteurs. Or, rappelle l’ONG, elles peuvent être la source d’importantes fuites radioactives, en particulier si le processus de refroidissement est interrompu pendant une durée prolongée, comme cela a été le cas à Fukushima. Il en existe 58 en France et celles-ci doivent être refroidies en permanence. Les assemblages de combustible sont maintenus de trois à six ans dans ces piscines, puis conservés sous l’eau durant dix à vingt ans avant d’être envoyés en retraitement. Des conclusions alarmantes Dans ce contexte Greenpeace estime légitime de s’interroger à propos « des conséquences potentielles d’actes malveillants » contre ces installations et propose un rapport détaillé sur la question. Le document expose « les conditions dans lesquelles une perte de refroidissement durable peut conduire à un relâchement massif de radioactivité dans ces piscines » et « s’attach[e] à décrire le type de menace d’agression externe crédible aujourd’hui ». Le conclusions des experts ne sont pas rassurantes, au contraire. Les piscines ne seraient pas recouvertes d’une structure suffisamment épaisse et résistante. De plus, les systèmes de pompage qui permettent d’alimenter les piscines en eau pourraient également être des cibles faciles pour les terroristes. Par conséquent, Greenpeace craint les conséquences sanitaires et environnementales graves que pourrait avoir une action visant les dites piscines. Bien que ce risque soit déjà connu depuis longtemps, rien ne semble entrepris en période d’état d’urgence prolongé pour garantir la sécurité des piscines. On notera qu’en Allemagne, les piscines se trouvent dans le même bâtiment que le réacteur, et bénéficient donc d’une meilleure protection. Crédit photo : Greenpeace Le nucléaire, un sujet qui reste tabou Comme chacun le sait, les français et l’industrie nucléaire partagent « une grande histoire d’amour » depuis la fin des années 70. L’ambitieux programme nucléaire civil, accompagné par une vaste campagne médiatique, va générer d’importantes retombées économiques positives pour la France. 40 ans après, difficile de remettre en question cette relation qui se fait de plus en plus compliquée alors que nombre de centrales arrivent en fin de vie, que le coût du démantèlement fait son entrée dans le débat (une facture totale du démantèlement qui est estimée par EDF à 60 milliards d’euros) et que le marché de l’énergie n’est radicalement plus le même qu’à l’époque. Par la force des choses, les risques aussi ne sont plus les mêmes. « Il faut briser l’omerta sur les risques qui planent sur les centrales nucléaires. EDF, qui exploite les centrales, ne peut ignorer cette situation. Elle doit impérativement prendre en main ce problème de sécurité en effectuant les travaux nécessaires pour sécuriser les piscines d’entreposage du combustible usé », estime dans un communiqué Yannick Rousselet, chargé de campagne nucléaire pour Greenpeace France Les responsables d’EDF comptent ils réagir à cette expertise indépendante ? Interrogés par Le parisien, Philippe Sasseigne assure dans une formulation générale censée rassurer que « tous les moyens sont mis en œuvre et de manière coordonnée, entre EDF et l’Etat ». Crédit photo : Greenpeace Un rapport remis aux hauts responsables en charge des questions de défense et sécurité Pour des raisons évidentes de sécurité, le rapport complet et détaillé n’a pas été rendu public. Néanmoins, il a été remis à de hauts responsables en charge des questions de défense et sécurité. Greenpeace espère désormais que EDF prendra les mesures nécessaires pour pallier les risques qui ont pu être identifiés et renforcer les structures visées. Seulement, ces travaux risquent de coûter cher, alors que les dépenses annoncées pour prolonger la durée de vie des centrales s’envolent : entre 1,6 milliard et 2,26 milliards par piscine, selon francetvinfo. Sources : propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation / greenpeace.fr |
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